Le quartier des enfants perdus

Plus que jamais d’actualité... la chronique de François d’Orcival
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Députés UMP qui avez voté une disposition supplémentaire pour éviter que se reproduise un drame comme celui du Chambon-sur-Lignon où la jeune Agnès, treize ans, fut violée et immolée par un garçon à peine plus âgé et récidiviste, vous avez trahi Victor Hugo et de Gaulle en obéissant à « d’obscures pulsions vengeresses ». Jean-Pierre Chevènement, Julien Dray, Ségolène Royal, Jack Lang, qui avez, vous aussi, appelé à la sanction des « sauvageons », vous faites « honte » à la gauche de Jaurès.

Toute politique qui veut réformer la circulaire de 1945 sur la justice des mineurs est purement « obscurantiste ». C’est un nouveau venu au prétoire des enfants qui le dit, Pierre Joxe, avocat commis d’office de 77 ans, ancien ministre de Mitterrand, ancien président de la Cour des comptes, ancien membre du Conseil constitutionnel. Le voici devenu accusateur public (Pas de quartier ?, chez Fayard).

Selon les chiffres cités par Jacques Attali (Candidats, répondez !, Fayard) 20% des crimes et délits (non routiers) sont le fait de mineurs, et parmi ceux-ci, 34% des atteintes aux biens. 78 000 mineurs font l’objet de mesures alternatives aux poursuites pénales ; 3 500 ont été envoyés en centres éducatifs fermés, 2000 dans des établissements à sécurité renforcée. Proportion infime, dit Joxe, tout en dressant le portrait de ces braqueurs, voleurs, dealers, multirécidivistes. Des enfants comme les autres mais plus paumés, ces éternels « chiens perdus sans collier ». La faute à qui ? A la société. Pierre Joxe Rousseau.

Sauf que l’obscurantisme dont il accuse ceux qui croient à l’éducation, à l’autorité, à la discipline, ne l’empêche pas de voir la réalité. « La moitié des mineurs que j’ai pu observer devant les tribunaux n’avaient pas de père. » Tiens ! La famille « monoparentale » en cause ? « Les institutions, dit-il aussi, ne valorisent ni le travail ni la culture ». Tiens, tiens ! L’enfer est donc toujours pavé de bonnes intentions. Qui a, au nom de la liberté de choix et autres allocations égalitaires, tant fait pour détruire la famille ? Qui veut arracher les tout-petits à leurs familles pour les confier au « service public » ? Qui s’est acharné à déconsidérer le travail ? « La société est un modèle, elle éduque pour le meilleur et pour le pire ». Pour le pire en effet : les amis de M. Joxe sont bien placés pour le savoir. On a les conséquences.

Le texte de cette chronique est paru dans Le Figaro Magazine du samedi 20 janvier 2012. Elle est reprise ici par son auteur, avec l’aimable autorisation de l’hebdomadaire. Les propos de François d’Orcival n’engagent que lui-même, et non pas l’académie à laquelle il appartient ni l’Institut de France.

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