ISF et bouclier fiscal, disparition annoncée : une chronique de François d’Orcival

La nocivité de la "danse des impôts" par le journaliste, de l’Académie des sciences morales et politiques
François d’ORCIVAL
Avec François d’ORCIVAL
Membre de l'Académie des sciences morales et politiques

La disparition simultanée de l’ISF et du bouclier fiscal fera-t-elle rentrer des capitaux et renforcera-t-elle la compétitivité française ? Improbable. François d’Orcival reprend ici, au micro de Canal Académie, la chronique qu’il donne, le samedi, dans Le Figaro Magazine.

Le texte de cette chronique est paru dans Le Figaro Magazine du samedi 27 novembre 2010. Elle est reprise ici par son auteur, avec l'aimable autorisation de l'hebdomadaire.
Sans ISF, il n’y aurait pas d’attaque du groupe LVMH contre la famille Hermès – parce que ses membres ne seraient pas obligés de vendre leurs actions pour payer leurs impôts. Or ici, nous restons entre deux groupes français ; quand l’assaut vient d’un groupe étranger les effets sur l’emploi sont directs. C’est ainsi que le capitalisme familial meurt à petit feu d’un impôt qui est « une invitation à sortir de France » (Yvon Gattaz). Mais comme il a été créé par Mitterrand, supprimé par Chirac (en 1986), puis rétabli par Mitterrand, il est devenu un « marqueur » de la gauche à ce point que la droite à renoncer à l’abroger alors qu’elle en connaissait les effets nocifs.

François d’Orcival est directeur de presse, chroniqueur régulier au Figaro Magazine, et membre de l’Académie des sciences morales et politiques.

En 2007, Nicolas Sarkozy a cru le vider de son contenu en élargissant le bouclier fiscal et en créant des exonérations à l’ISF pour le mécénat et les investissements. Outre le matraquage de la gauche contre ces « cadeaux aux riches », le bouclier lui aura révélé l’absurdité du système. Il vient donc de se résoudre à supprimer ISF et bouclier pour les remplacer par un impôt sur les revenus du patrimoine. (lesquels sont déjà taxés). Son argument : renforcer la compétitivité fiscale de la France vis-à-vis de l’Allemagne.

Mais pour y parvenir sans trop de casse comment faire ? Le 2 août dernier, Nicolas Sarkozy chargeait la Cour des comptes d’établir un « état des lieux comparé des systèmes fiscaux français et allemand ». Seulement, le premier président de la Cour, Didier Migaud est socialiste. Qui peut croire qu’il soit pressé de rendre ses conclusions alors que son parti est déjà en campagne contre la disparition de l’ISF ? Il demande une « étude globale et approfondie », ce qui réclame du temps. Le rapport sera-t-il remis en février, en mars ? Il faudra ensuite ouvrir le débat. D’ici là, la gauche aura eu le temps de faire barrage au projet. Naturellement quand le texte viendra au Parlement, elle sera battue, mais Martine Aubry pourra annoncer : quand nous reviendrons, nous abrogerons cette « fiscalité injuste».

Que restera-t-il de la bonne intention initiale ? La disparition simultanée de l’ISF et du bouclier fera-t-elle entrer des capitaux ? Improbable. Pour une bonne raison : tant que ce pays n’aura pas compris que l’instabilité fiscale est aussi dissuasive que la nocivité fiscale, il ne rétablira pas la confiance indispensable aux créateurs de richesse.

En savoir plus :

François d'Orcival membre de l'Académie des sciences morales et politiques

Retrouvez l'émission " Affaires internationales" de François d'Orcival et Thierry de Montbrial.

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